1Christine PlantĂ© nous a habituĂ©s Ă  des gĂ©nĂ©alogies inattendues et Ă  des regroupements familiaux insolites, sa « petite sƓur de Balzac », dans la lignĂ©e de la sƓur de Shakespeare chĂšre Ă  Virginia Woolf, en est un exemple bien connu. Avec George Sand fils de Jean-Jacques, elle nous entraĂźne dans une histoire de filiation qui, cette fois, n’est pas de son
Lucile-Amantine-Aurore Dupin, dite George Sand, naquit Ă  Paris, rue Meslay, le 1er juillet 1804. Son pĂšre, Maurice Dupin, aide de camp du roi Murat, petit-fils du marĂ©chal de Saxe par sa mĂšre, Aurore de Saxe, mariĂ©e Ă  Claude Dupin de Francueil, fermier gĂ©nĂ©ral, appartenait donc Ă  de grandes familles, tandis que sa mĂšre appartenait au peuple de Paris Sophie Delaborde Ă©tait fille d’un oiselier du quai de la MĂ©gisserie. Le mariage de son fils Maurice avec une femme de si humble extraction dĂ©plut fort Ă  Madame Dupin de Francueil ; toute la jeunesse de la petite Aurore devait en ĂȘtre troublĂ©e. À l’ñge de quatre ans, elle partit avec sa mĂšre rejoindre son pĂšre qui faisait la guerre en Espagne avec Murat. C’est dans ce voyage de Paris Ă  Madrid que l’enfant eut la rĂ©vĂ©lation de la vie et de la mort. Sa mĂšre lui faisait remarquer les beautĂ©s du ciel et des fleurs ce furent les liserons, fleuris dans les montagnes, qui lui firent goĂ»ter pour la premiĂšre fois les dĂ©lices de l’odorat ; un peu plus loin, dans une auberge, on lui avait donnĂ© un pigeon, mais il voulait s’échapper et, ne sachant comment le conserver, elle demanda qu’on le remĂźt avec ses compagnons. Sa mĂšre lui dit qu’on Ă©tait en train de les tuer, l’enfant voulut qu’on le tua aussi. George Sand en 1830, par Candide Blaize EtonnĂ©e de cette insistance, sa mĂšre comprit que l’enfant ne faisait pas de diffĂ©rence entre le sommeil et la mort il fallait le lui enseigner. Mme Dupin l’emmena alors pour lui montrer avec quelles convulsions les pauvres bĂȘtes agonisaient. Devant les cris dĂ©chirants de l’enfant qui rĂ©clamait son pigeon, Mme Dupin le lui rendit elle l’avait cachĂ© sous son bras ; l’enfant en ressentit alors une joie extrĂȘme. C’était dans le palais du Prince de la Paix Godoy que Murat et sa suite habitaient. L’appartement des Dupin Ă©tait immense et tout tendu de damas de soie cramoisi. Il se trouvait dans ce palais d’étranges hĂŽtes, aprĂšs la fuite des possesseurs c’étaient des lapins qui vivaient en libertĂ© dans les plus belles salles d’apparat, et Aurore eut la joie d’en trouver un tout blanc qui vint manger dans sa main et dormir sur ses genoux. Mais elle connut un ĂȘtre bien plus extraordinaire encore, celui que l’on nommait le Prince » comme dans les contes de fĂ©es c’était Murat lui-mĂȘme. Il prit l’enfant en amitiĂ©, car pour se faire pardonner la prĂ©sence de la fillette dans les horreurs de la guerre, Mme Dupin l’avait revĂȘtue d’un costume d’aide de camp identique Ă  celui de son pĂšre pantalon de casimir amarante, avec des broderies d’or Ă  la hongroise, dolman blanc galonnĂ© et boutonnĂ© d’or, pelisse pareille garnie de fourrure noire, jetĂ©e sur l’épaule, et un grand sabre traĂźnant derriĂšre les petites bottes de maroquin rouge » ; rien n’y manquait. Murat prĂ©senta l’enfant en riant aux personnes qui venaient chez lui. Mais la petite Aurore qui aimait dĂ©jĂ  la libertĂ© Ă©tait bien plus heureuse lorsque ayant quittĂ© ce brillant uniforme, elle revĂȘtait le costume espagnol que l’on portait alors, robe de soie noire bordĂ©e d’un grand rĂ©seau de soie qui prenait au genou et tombait en franges jusqu’à la cheville, et la mantille plate en crĂȘpe noir, bordĂ©e d’une large bande de velours ». Ce fut lĂ  aussi, sur la terrasse, qu’elle connut les premiĂšres joies de la solitude pour rĂȘver, jusqu’au jour oĂč tout Ă  coup, ressentant la peur de cette solitude, elle appela le domestique de son pĂšre qui lui servait de bonne d’enfant. Une voix rĂ©pĂ©ta Weber ». L’enfant, intriguĂ©e, chercha qui pouvait parler, qui rĂ©pĂ©tait le nom qu’elle venait de prononcer. Elle recommença, appela sa mĂšre cette fois, puis dit son propre nom chaque fois la voix mystĂ©rieuse rĂ©pondait les mĂȘmes paroles. Elle cacha cette Ă©trange aventure Ă  sa mĂšre jusqu’au moment oĂč celle-ci surprit l’enfant appelant toute seule sur la terrasse ; elle lui apprit alors que c’était l’écho qui lui rĂ©pondait. Aurore n’était plus seule ; elle avait trouvĂ© un ami, un compagnon de solitude l’écho. Il devint son autre elle-mĂȘme ; elle l’appelait son double ». Combien de fois dans l’avenir le chercha-t-elle dans sa solitude morale, dans son amour de la rĂȘverie, dans son grand besoin de dĂ©couvrir son pareil. De retour en France, Ă  travers feu et sang, couchant dans les camps, elle revint chez sa grand-mĂšre Ă  Nohant, maison seigneuriale oĂč elle devait passer la plus grande partie de sa vie. Mais la mort subite de son pĂšre 17 septembre 1808, tuĂ© d’une chute de cheval, Ă  cent mĂštres du pont du Lion d’Argent, en revenant Ă  Nohant dans la nuit, fut le dĂ©but d’une longue crise de chagrin. L’éducation de l’enfant devint une cause de mĂ©sentente entre la grand’mĂšre et sa belle-fille dont l’éducation et la nature Ă©taient si diffĂ©rentes l’une de l’autre. Aurore dut entrer au Couvent des Dames anglaises » oĂč elle fut adoptĂ©e et chĂ©rie de tout le monde ; son dĂ©veloppement fut celui des jeunes filles de l’aristocratie de cette Ă©poque. Cependant, en dehors des jeux oĂč elle Ă©tait la plus endiablĂ©e, en dehors des comĂ©dies oĂč elle Ă©tait la meilleure interprĂšte, oĂč elle adapta mĂȘme une piĂšce de MoliĂšre avec une grande libertĂ© enfantine sans doute, elle portait en elle son Ăąme ardente et mystique qui la jeta dans une dĂ©votion qui l’inclinait Ă  dĂ©sirer prononcer ses vƓux. Son exaltation religieuse que son confesseur et la mĂšre Alicia combattaient doucement, effraya sa grand-mĂšre qui sortit de sa retraite du Berry pour venir l’arracher du couvent. George Sand en 1837. Dessin colorisĂ© de Luigi Calamatta Cette fois, Aurore revint en larmes Ă  Nohant. Elle regrettait ses compagnes et la douceur de la vie monacale. II fallut l’intelligente bontĂ© de Msup>me Dupin de Francueil pour reprendre de l’empire sur la jeune fille qui retrouvait avec tristesse les luttes morales entre sa grand-mĂšre et sa mĂšre. Elle les aimait Ă©galement, mais Aurore de Saxe sut Ă©veiller dans sa petite-fille un cĂŽtĂ© atavique intellectuel qui fit de rapides progrĂšs sous sa bonne influence et donna Ă  Aurore le dĂ©sir d’élargir ses connaissances pour mĂ©riter l’affection de la grande dame qui l’adorait. Elle devint bientĂŽt sa garde-malade, Mme de Francueil, Ă©tant atteinte de paralysie ; avec son caractĂšre gĂ©nĂ©reux et altruiste, la jeune fille passa son temps au chevet de sa grand-mĂšre. Pendant la nuit elle lisait, tout en la veillant ; elle entourait de soins la pauvre femme qui dĂ©clinait. Ce fut le vieux prĂ©cepteur de Maurice Dupin, devenu le rĂ©gisseur des biens de Mme de Francueil, qui secondait la jeune fille dans les soins qu’elle donnait Ă  sa grand-mĂšre. En voyant combien Aurore se fatiguait, Deschartres lui ordonna de prendre des exercices physiques, de monter Ă  cheval, de ne point s’enfermer jour et nuit auprĂšs de la malade. Il traitait Aurore comme il avait traitĂ© son pĂšre, c’est-Ă -dire en garçon ; il lui fit revĂȘtir des vĂȘtements d’homme pour le suivre Ă  la chasse dans les champs labourĂ©s. Du reste, c’était une mode assez souvent suivie pour passer inaperçue ou pour voyager. Aurore, entre la lecture des philosophes, l’inquiĂ©tude que lui donnait la santĂ© de sa grand-mĂšre chĂ©rie, les promenades obligatoires, l’activitĂ© d’un esprit ouvert et passionnĂ© pour la vĂ©ritĂ©, se dĂ©veloppa presque seule. Son extrĂȘme sensibilitĂ© exaltĂ©e par sa nature, tantĂŽt d’une mĂ©lancolie extrĂȘme, tantĂŽt d’une exubĂ©rance juvĂ©nile, ressentit une seconde fois l’horreur de la sĂ©paration ; sa grand-mĂšre mourut, confiant sa direction morale Ă  la famille paternelle d’Aurore, dĂ©sirant, par lĂ , contre-balancer l’influence et le caractĂšre de sa belle-fille. Mais lorsque ses parents, aprĂšs la mort de Mme de Francueil, mirent la jeune fille en demeure d’abandonner sa mĂšre et de la renier, celle-ci, obĂ©issant Ă  son esprit de justice, Ă  son besoin d’équitĂ©, Ă  son cƓur tendre, Ă  la noblesse de son caractĂšre, prĂ©fĂ©ra l’oubli et les anathĂšmes de ses parents nobles plutĂŽt’ que de commettre une vilenie. Elle n’en fut pas rĂ©compensĂ©e ; sa mĂšre tout en l’aimant, la fit durement souffrir par son caractĂšre emportĂ© et souvent injuste. C’est ainsi que ne sachant pas gouverner sa fille, elle la conduisit chez les Duplessis, famille agrĂ©able oĂč elle rencontra celui qui devint bientĂŽt son mari. Casimir Dudevant Ă©tait un jeune officier en non activitĂ©, fils du colonel baron Dudevant, descendant Ă©loignĂ© de la famille Ă©cossaise de Law. Les deux jeunes gens avaient Ă©prouvĂ© l’un pour l’autre une sympathie presque amicale, une confiance rĂ©ciproque qui les aiderait longtemps dans le mariage Ă  conserver l’un pour l’autre une affection qui devait prĂ©server leur foyer jusqu’au moment oĂč les dĂ©fauts de Casimir augmentĂšrent de telle sorte que sa femme ne put les supporter davantage. C’est aprĂšs avoir renoncĂ© au bel amour rĂ©ciproque avec AurĂ©lien de SĂšze, d’un commun accord sacrifiĂ© au devoir, qu’Aurore, ayant senti toute la diffĂ©rence de goĂ»ts et d’aspirations qui existait entre elle et Casimir, chercha, en Ă©crivant, Ă  rendre sa vie plus supportable. AprĂšs une entente avec son mari, elle partit pour Paris, emmenant sa fillette, tandis que son fils Maurice entrait au collĂšge. Elle dĂ©buta dans la littĂ©rature en collaboration avec Jules Sandeau, camarade berrichon pour lequel elle eut ensuite une affection qui finit par une cruelle dĂ©ception. Le nom de George Sand qu’elle prit pour Ă©crire, Ă©tait nĂ© de chagrins domestiques et d’une rupture littĂ©raire. Elle eut bientĂŽt un brillant succĂšs avec Indiana, puis avec Valentine, LĂ©lia, le plus grand chef-d’Ɠuvre littĂ©raire fĂ©minin, mĂ©lange de philosophie, d’amour, de passion, d’un style romantique et d’une majestĂ© de composition rare, qui la mit au premier rang de tous les Ă©crivains de son Ă©poque. Elle rencontra vers ce moment-lĂ  Alfred de Musset, qui l’admirait. D’un caractĂšre trĂšs diffĂ©rent du sien, et d’une valeur tout autre, il s’éprit d’elle. La passion qu’ils Ă©prouvĂšrent l’un pour l’autre leur fit croire un instant au bonheur pour les dĂ©chirer ensuite. Le travail, l’amitiĂ© qui accompagnait toujours chez George, mĂȘme les pires dĂ©sillusions ou les pires chagrins, joints Ă  son amour profond pour ses enfants, l’aidĂšrent Ă  surmonter l’envie du suicide dans le dĂ©nouement de cette union malheureuse. Maurice Sand 1823-1889. Dessin de Luigi Calamatta Mais, aprĂšs cette nouvelle Ă©preuve, elle ne voulait ni ne pouvait se plier Ă  la vie conjugale depuis longtemps terminĂ©e de fait elle plaida en sĂ©paration. Les torts de son mari furent reconnus elle garda ses enfants. Son fils Maurice fut la consolation de sa vie par son affection et ses hautes qualitĂ©s. Tandis que sa fille Solange fut la source d’une angoisse perpĂ©tuelle. Son caractĂšre Ă©tait fantasque et malintentionnĂ©. George Sand Ă©tait belle, d’une beautĂ© brune et pĂąle, Ă©trange Ă  cause de ses grands yeux profonds presque noirs, mats et veloutĂ©s. La bouche Ă©tait bien dessinĂ©e, ni charnue, ni Ă©paisse, mais pleine, sinueuse et moyenne. Son nez Ă©tait d’une belle ligne, aquilin sans ĂȘtre bosselĂ©, les narines dĂ©licates. Son front haut, lĂ©gĂšrement fuyant, Ă©tait pur, ses cheveux, ondĂ©s, bouclaient naturellement et encadraient d’un nuage sombre son visage allongĂ©. D’humeur mĂ©lancolique, avec de brusques gaietĂ©s d’enfant, elle Ă©tait irrĂ©sistible. Tour Ă  tour animĂ©e, rĂȘveuse, silencieuse, passionnĂ©e sous un aspect tranquille, triste jusqu’au dĂ©sespoir, ne craignant rien, ni peine, ni fatigue, ni travail, ni dĂ©sapprobation quand elle sentait qu’elle avait raison, elle fut la plus courageuse des femmes, et elle Ă©leva sa vocation de romanciĂšre jusqu’aux plus hauts et aux plus nobles problĂšmes de l’humanitĂ©. Philosophe et troubadour », elle fit entendre pendant un demi-siĂšcle la voix de ses sentiments gĂ©nĂ©reux, de son Ăąme indĂ©pendante. Jacques, si plein d’elle-mĂȘme, de son Ă©moi, profond et intime ; Le Marquis de Villemeir, Mauprat le roman d’un seul amour au cƓur d’un homme ; Claudie, chef-d’Ɠuvre pastoral, puis Consuelo, Les MaĂźtres sonneurs, oĂč l’art musical tient la premiĂšre place ; Le PĂ©chĂ© de M. Antoine, Valentine, Jean de La Roche, Le Compagnon du Tour de France, oĂč elle exposait sous un tour romanesque les idĂ©es sociales qui se rĂ©alisĂšrent plus tard. L’Homme de Neige, La Comtesse de Rudolstardt, Les Beaux Messieurs de Bois-DorĂ©, unissent de brillantes aventures Ă  la psychologie humaine Ă  travers l’histoire. Si son style admirable s’est teintĂ© dans certaines Ɠuvres de la couleur de l’époque romantique, il reste malgrĂ© ce reflet de l’ambiance l’expression magnifique d’une nature rare, d’un maĂźtre gĂ©nial. On lira toujours Sand parce qu’elle exprime ce qu’elle Ă©tait elle-mĂȘme l’amour, l’intelligence et la bontĂ©. Ce qui caractĂ©rise encore la grande George, c’est l’ampleur et l’indĂ©pendance de ses idĂ©es, c’est aussi la simplicitĂ© de son gĂ©nie. Elle fut l’amie de tous les artistes et de tous les Ă©crivains cĂ©lĂšbres de son temps qu’elle devançait ou dĂ©passait par l’ardente aspiration de son cƓur altruiste et par son intuition de l’avenir. DouĂ©e pour la comprĂ©hension de toutes choses, elle aimait et connaissait la musique, l’histoire naturelle, le dessin, la peinture, les menus soins du foyer. Elle fut non seulement l’amie des Ă©crivains et des poĂštes, mais aussi des musiciens, de Liszt, de Meyerbeer et de Chopin avec lequel un long attachement fut rompu par des raisons en dehors du sentiment des deux amis. Les peintres et les graveurs Charpentier, Couture, Calamatta, furent ses hĂŽtes assidus ; Delacroix la visita souvent Ă  Nohant et devint le maĂźtre de Maurice, fils de George Sand, tandis que Calamatta, le cĂ©lĂšbre graveur d’Ingres et de la Joconde, donnait Lina, sa fille, en mariage Ă  Maurice. Alexandre Manceaux gravait le portrait de George Sand par Thomas Couture, et l’ouvrage remarquable de Maurice Sand Masques et Bouffons. EugĂšne Lambert, Villevielle Leleux, VĂ©ron, Castan, CicĂ©ri, ThĂ©odore Rousseau, et d’autres, l’entouraient et la consultaient, tandis que ClĂ©singer, le cĂ©lĂšbre sculpteur du Second Empire, Ă©pousait sa fille Solange. Un cĂ©nacle, illustre ne cessa d’admirer et d’estimer George Sand. Victor Hugo, Lamartine, Chateaubriand, Lamennais, Balzac, ThĂ©ophile Gautier, les Dumas, Ernest Renan, Gustave Flaubert, Fromentin, Berthelot, Marie Dorval, Bocage, la Malibran, BĂ©ranger, Berton, Mme Viardot, Mme Arnould-Plessy, Sarah Bernhardt, Mme Worms-Barretta, tous les illustres artistes dramatiques aussi bien que les crĂ©ateurs, la vĂ©nĂ©raient et l’aimaient. Elle encouragea Anatole France, Alphonse Daudet, Émile Zola ; partout oĂč elle rencontrait le talent, elle le louait, le soutenait et lui portait l’amour dĂ©sintĂ©ressĂ© d’un vĂ©ritable apĂŽtre. Sa gĂ©nĂ©rositĂ© Ă©galait son pouvoir de crĂ©ation. Elle gagna une fortune, non pas en se jouant comme d’aucuns pourraient le croire, mais par l’assiduitĂ© d’un labeur constant qu’elle ne se permettait jamais de diffĂ©rer ou d’interrompre ; elle avait ses enfants a Ă©lever, avec eux beaucoup d’enfants adoptifs, sans compter les autres secourus qu’elle avait pris sous sa protection. Elle alimenta donc du gain de son Ɠuvre ceux qui avaient besoin d’elle et ne garda presque rien elle ne donnait pas seulement son cƓur, sa fortune, son intelligence et son amour, elle donnait son idĂ©al Ă  l’humanitĂ©. Une telle individualitĂ© ne pouvait pas se borner Ă  cĂ©lĂ©brer dans ses Ɠuvres l’amour et les aventures romanesques, elle avait un vol d’une trop large envergure pour ne pas agrandir son champ d’action elle chercha donc Ă  exalter le dĂ©vouement sous toutes ses formes pour amĂ©liorer les conditions de la vie. Tous les problĂšmes sociaux l’intĂ©ressaient, et son gĂ©nie serait reprochĂ© de ne pas contribuer au bien que son Ăąme dĂ©sirait. Maison de George Sand Ă  Nohant-Vic Indre. Timbre Ă©mis le 9 septembre 2013dans la sĂ©rie Patrimoine de France. Dessin de StĂ©phane Humbert-Basset Si George Sand Ă©tait une haute pensĂ©e, un grand Ă©crivain et un philosophe, elle Ă©tait aussi l’amante de la nature et des humbles. Ses romans champĂȘtres furent de nouveaux chefs-d’Ɠuvre aprĂšs ceux qui la rendirent cĂ©lĂšbre. Elle connaissait la vie des paysans. Elle les recrĂ©a selon son cƓur tels qu’elle les a dĂ©peints, ils restent une crĂ©ation adorable. Sa vie, souvent tourmentĂ©e par la recherche du compagnon qu’elle rĂȘvait de rencontrer pour partager ses enthousiasmes et son idĂ©al, ne l’empĂȘcha jamais de penser Ă  autrui avant de penser Ă  elle-mĂȘme. Elle sut se sacrifier, elle sut aussi sauvegarder son travail, et son indĂ©pendance d’opinion elle n’usa jamais de ses droits Ă  la recherche du bonheur personnel qu’aprĂšs avoir rempli les nombreux devoirs qu’elle s’était imposĂ©s. Enfin, Ă  ce cƓur si fĂ©minin, si maternel, Ă  cette intelligence si noble, elle sut ajouter une loyautĂ© virile. Avec sa famille, elle Ă©tait aussi tendre, aussi jeune d’esprit dans sa vieillesse que pendant la pĂ©riode la plus mouvementĂ©e de sa vie sentimentale elle avait en plus de ce feu intĂ©rieur qui la rendait si sĂ©duisante, une grande sĂ©rĂ©nitĂ© qu’elle avait conquise sur elle-mĂȘme. AprĂšs avoir longtemps espĂ©rĂ© rencontrer le compagnon de ses rĂȘves, le soutien dans l’existence sur lequel on peut se reposer, elle avait vu peu Ă  peu mourir cet espoir, mais un autre avait grandi auprĂšs d’elle, s’était fortifiĂ© de ses dĂ©ceptions mĂȘmes, s’était consacrĂ© Ă  son amour et Ă©tait devenu une belle rĂ©alitĂ© c’était son fils, Maurice. Dans les derniĂšres annĂ©es de son existence, nous la retrouvons apaisĂ©e et sereine, sa destinĂ©e rĂ©alisĂ©e, son Ăąme satisfaite, jouissant avant tout de son intĂ©rieur parfaitement heureux, dans sa retraite bien-aimĂ©e de Nohant. Elle aimait passionnĂ©ment ce coin de terre paisible, milieu calme, humble et silencieux, tout plein du souvenir de sa grand-mĂšre, oĂč, selon ses souhaits, elle mourut et fut enterrĂ©e. Sa famille se composait de son fils Maurice, pour elle ami tout autant que fils, de sa belle-fille, Mme Maurice Sand, nĂ©e Talamatta, sa perle de la maison », comme elle se plaisait, Ă  l’appeler, et de leurs deux enfants, Aurore et Gabrielle. Ces deux charmantes crĂ©atures faisaient la joie de leur grand-mĂšre qui disait d’elles Ces chers petits ĂȘtres sont tout dans la vieillesse, mais la vie se passe Ă  trembler pour eux ! » Cette derniĂšre pĂ©riode de la vie de George Sand nous a Ă©tĂ© principalement rĂ©vĂ©lĂ©e par la publication de sa correspondance, mais c’est le sixiĂšme et dernier volume qui nous fait assister au plein Ă©panouissement de ses convictions, Ă©clatant d’autant plus vives qu’elle se heurte partout Ă  un dĂ©bordement d’athĂ©isme et de froid positivisme dont elle ne peut se consoler. La foi en l’idĂ©al devint pour elle un impĂ©rieux besoin en face de la ruine et du deuil de son pays, en la lugubre annĂ©e 1870. Quel chemin de croix pour cette ardente patriote, pour cette Ăąme humanitaire qui Ă©crivait, navrĂ©e Cette boucherie humaine met mon pauvre cƓur en loques ! » L’avĂšnement de la RĂ©publique fut, pour George Sand, un court instant d’une joie effacĂ©e bien vite par les angoisses innombrables de ces longs mois d’épreuve ; ils firent tant saigner son cƓur qu’elle se demandait s’il vivait encore. Pourtant, ferme toujours, elle ne se laissa pas abattre et tĂącha d’encourager les autres. La vie est si lourde pour les. hommes, Ă  prĂ©sent, Ă©crivait-elle le 22 fĂ©vrier 1871 Ă  Mme Edmond Adam, que les femmes leur doivent de ne pas ajouter Ă  leurs craintes et Ă  leurs chagrins. » Cette fermetĂ© lui devint plus difficile lorsqu’aux dĂ©sastres de la guerre succĂ©dĂšrent ceux de la Commune. Il lui fallut lutter contre de vraies crises d’abattement, ce qui lui faisait Ă©crire plus tard Je ne veux pas ĂȘtre dĂ©couragĂ©e, je ne veux pas renier le passĂ© et redouter l’avenir, mais c’est ma volontĂ©, c’est mon raisonnement qui luttent contre une impression profonde, insurmontable quant Ă  prĂ©sent. » Le travail fut encore cette fois pour George Sand le remĂšde hĂ©roĂŻque ; il rendit non seulement Ă  son esprit son Ă©lasticitĂ© et sa vigueur accoutumĂ©es, mais lui fournit le moyen de rĂ©parer des pertes matĂ©rielles et de rĂ©pondre avec sa gĂ©nĂ©rositĂ© habituelle aux appels faits Ă  sa bourse, plus nombreux que jamais et jamais infructueux. À l’ñge de soixante-huit ans, elle se remit Ă  travailler huit heures par jour, ayant retrouvĂ©, Ă©crivait-elle Ă  Flaubert, une santĂ© de fer et une vieillesse exceptionnelle, bizarre mĂȘme, puisque mes forces augmentent Ă  l’ñge oĂč elles devraient diminuer. Le jour oĂč j’ai rĂ©solument enterrĂ© la jeunesse, j’ai rajeuni de vingt ans. Tu me diras que l’écorce ne subit pas moins l’outrage du temps. Cela ne fait rien, le cƓur de l’arbre est fort bon, et la sĂšve fonctionne comme dans les vieux pommiers de mon jardin, qui fructifient d’autant mieux qu’ils sont plus racornis. » C’est de cette Ă©poque que date la collaboration de l’énergique sexagĂ©naire au journal Le Temps, avec la rĂ©daction duquel son ami Charles Edmond l’avait mise en rapport. Elle lui envoya deux feuilletons par mois, sur des sujets trĂšs variĂ©s, inspirĂ©s par le plus pur patriotisme et n’ayant d’autre but que de contribuer au relĂšvement moral de la France. Ces articles se trouvent pour la plupart dans les deux volumes Impressions et Souvenirs et DerniĂšres pages. Son charmant roman de Nanon parut aussi alors en feuilleton dans Le Temps, ainsi que les Contes d’une grand-mĂšre et les Promenades autour d’un village. Quant aux autres, ce fut, comme par le passĂ©, la Revue des Deux-Mondes qui en eut la primeur. George Sand vers 1870. Gravure colorisĂ©e de Smeeton-Tilly À tout ce travail de l’écrivain s’ajoutait une correspondance Ă©norme, grossie d’envois considĂ©rables de livres et de manuscrits de jeunes auteurs. George Sand lisait tout, rĂ©pondait Ă  tout, toujours pleine de bontĂ© et d’indulgence, sachant dire la vĂ©ritĂ© sans dĂ©courager, mais en dĂ©montrant la nĂ©cessitĂ© du travail et de l’effort pour arriver Ă  produire une oeuvre bonne et belle. Venaient enfin les heures de dĂ©lassements que la bonne grand-mĂšre, dĂ©chargĂ©e par son aimable belle-fille de tous les soins de l’intĂ©rieur, consacrait tout entiĂšres Ă  sa famille et aux nombreux amis qui venaient, en Ă©tĂ© surtout, animer son hospitaliĂšre maison, et se nommaient Alexandre Dumas fils, Gustave Flaubert, M. et Mme Edmond Adam, Mme Arnould Plessy, Tourgueneff, Mme Viardot et ses filles, etc. Aux jouissances de la conversation s’ajoutaient celles de la musique et du théùtre qui passionnaient George Sand. Le théùtre, le fameux théùtre de Nohant, organisĂ© par Maurice Sand pour distraire et amuser sa mĂšre, donnait alors ses plus belles piĂšces, et les spectateurs s’émerveillaient de l’entrain du directeur. Tout Ă  la fois auteur, acteur, dĂ©corateur, lampiste, machiniste, il avait inventĂ© un systĂšme nouveau pour mettre Ă  lui seul trente marionnettes en scĂšne et rendre le théùtre de Balandard » digne de ses auditeurs et de sa renommĂ©e. Mais par-dessus tout, les heures heureuses et reposantes Ă©taient pour George Sand celles qu’elle vouait Ă  l’éducation et Ă  l’instruction de ses deux petites-filles, de l’aĂźnĂ©e surtout qu’elle appelait Aurore, ma passion ! » Elle voulut elle-mĂȘme lui enseigner Ă  lire et Ă  cet effet s’appliqua Ă  la composition d’un abĂ©cĂ©daire Ă  propos duquel elle Ă©crivait Ă  Flaubert Te cherche Ă  rendre clairs les dĂ©buts de l’enfant dans la vie cultivĂ©e, persuadĂ©e que la premiĂšre Ă©tude imprime son mouvement sur toutes les autres et que la pĂ©dagogie nous enseigne toujours midi Ă  quatorze heures. » Quel excellent pĂ©dagogue devait ĂȘtre ce grand esprit possĂ©dant si bien les qualitĂ©s morales essentielles de l’emploi jeunesse d’esprit et amour de l’enfance ! Elle adorait les enfants dont le bruit et le mouvement, au contraire de la plupart des personnes ĂągĂ©es, Ă©taient pour elle autant un besoin qu’un plaisir. On voyait sans cesse sa table de travail encombrĂ©e de poupĂ©es et de polichinelles ; elle travaillait au milieu des jeux de ses petites-filles, prenait part souvent Ă  leurs joyeux Ă©bats, et tous les soirs, avant de les envoyer coucher, 6e mettait au piano pour les faire danser. Du reste, en lisant sa correspondance, il est impossible de croire Ă  l’ñge de George Sand la jeunesse de son esprit, la vivacitĂ© de ses impressions, le font sans cesse oublier. Ce qui certainement contribuait Ă  entretenir la vigueur physique de cette femme exceptionnelle, c’étaient les grandes courses Ă  travers prĂ©s et bois qu’elle entreprenait Ă  la suite de son fils, passionnĂ© de recherches entomologiques et dont nous trouvons une peinture charmante dans les Promenades autour d’un village. Puis, en Ă©tĂ©, elle se plongeait journellement dans les flots glacĂ©s de l’Indre, sans Ă©couter son mĂ©decin, et en dĂ©pit d’une coqueluche gagnĂ©e auprĂšs de ses petites-filles, et qui rĂ©sista Ă  un long sĂ©jour fait au bord de la mer, une de ses rares derniĂšres absences de Nohant. Cet Ăąge, par contre, se trahit dans les pages intimes oĂč George Sand Ă©panche son cƓur auprĂšs de ses meilleurs amis, par l’expĂ©rience, la sagesse, la rĂ©signation, l’espĂ©rance qu’elle a acquises et qui lui ont enseignĂ© Ă  juger la vie d’une façon si sereine, si noble et si Ă©levĂ©e. Les injustices, les tristesses, les douleurs inĂ©vitables en ce monde ne la rĂ©voltent plus comme autrefois contre l’ordre social. Il ne faut ni maudire, ni mĂ©priser la vie, dit-elle ; si le chagrin est bon Ă  quelque chose, c’est Ă  nous dĂ©fendre de l’égoĂŻsme. Plus loin, elle ajoute Je suis bien, bien patiente et j’empĂȘche tant que je peux les autres de s’impatienter, tout est lĂ  ; l’ennui du mal double toujours le mal. Quand serons-nous sages comme les anciens l’entendaient ? Cela, en somme, voulait dire patients, pas autre chose. Il faut ĂȘtre patients un peu pour commencer, et puis, on s’y habitue ; si nous ne travaillons pas sur nous-mĂȘmes, comment espĂ©rer qu’on sera toujours en train de travailler sur les autres ? » Et ailleurs Je ne sais rien de rien, qu’aimer et croire Ă  un idĂ©al », Ă©crit-elle encore ; et plus loin Le bonheur, c’est l’acceptation de la vie quelle qu’elle soit ! » Elle croit au progrĂšs, malgrĂ©-tout ; y travailler pour soi et les autres, voilĂ  le but de l’existence, pour lequel on trouve la force qu’on ne croyait pas avoir, quand on dĂ©sire ardemment gravir, monter un Ă©chelon tous les jours ». Il lui fallait aussi un grand courage, Ă  la noble femme, alors que le vide se faisait de toutes parts autour d’elle, et qu’elle voyait disparaĂźtre les uns aprĂšs les autres tant d’amis bien chers. La vie, Ă©crivait-elle en face d’une de ces pertes douloureuses, est une suite de coups dans le cƓur. Mais le devoir est lĂ , il faut marcher et faire sa tĂąche sans contrister ceux qui souffrent avec nous. » Son Ă©nergie ne l’abandonna jamais et sembla augmenter Ă  mesure que se montrĂšrent des souffrances indĂ©terminĂ©es d’abord, mais qui finirent par faire reconnaĂźtre un mal chronique des intestins. Les crises devinrent plus aiguĂ«s et plus frĂ©quentes, mais tout en les combattant, George Sand s’en tourmentait beaucoup moins que des nĂ©vralgies dont souffrait son fils. La derniĂšre lettre du dernier volume de la Correspondance est adressĂ©e Ă  son mĂ©decin de Paris, Henri Favre. Il est curieux de voir comment la malade y rend compte de son Ă©tat L’état gĂ©nĂ©ral n’est pas dĂ©tĂ©riorĂ©, et, malgrĂ© l’ñge soixante-douze ans bientĂŽt, je ne sens pas les atteintes de la sĂ©nilitĂ©. Les jambes sont bonnes, la vue est meilleure qu’elle n’a Ă©tĂ© depuis vingt ans, le sommeil est calme, les mains sont aussi sĂ»res et aussi adroites que dans la jeunesse. Quand je ne souffre pas de ces cruelles douleurs, il se produit un phĂ©nomĂšne particulier, dĂ» sans doute Ă  ce mal localisĂ© je me sens plus forte et plus libre dans mon ĂȘtre que je ne l’ai peut-ĂȘtre jamais Ă©tĂ©. J’étais lĂ©gĂšrement asthmatique, je ne le suis plus ; je monte des escaliers aussi lestement que mon chien. Mais une partie des fonctions de la vie Ă©tant presque absolument supprimĂ©es, je me demande oĂč je vais, et s’il ne faut pas s’attendre Ă  un dĂ©part subit, un de ces matins. J’aimerais mieux le savoir tout de suite que d’en avoir la surprise. » Deux jours aprĂšs cette lettre, George Sand s’est alitĂ©e et aprĂšs dix jours de souffrances, meurt le 8 juin 1876. Ses paroles derniĂšres furent Laissez... verdure... pas de pierre, laissez pousser l’herbe. » Ce dĂ©sir conforme Ă  son amour de la nature, de la simplicitĂ©, fut suivi par ses enfants. Quand on l’enterra, un paysan des environs de Nohant s’approcha de la tombe et y dĂ©posa une couronne en disant Au nom des paysans de Nohant, mais pas au nom des pauvres ; grĂące Ă  elle, il n’y a plus de pauvre ici ! » Lettreautographe signĂ©e au prĂ©fet de Constantine FortunĂ© Lapaine. Nohant, 20 dĂ©cembre 1861 ; 7 pages in-8°. Longue et belle lettre de soutien Ă  son ami Patureau que George Sand compare Ă  un de ses personnages de roman, Patience, le philosophe qui ose braver la peur des Mauprat : « Mon excellement ami le colonel Ferri Pisani me fait lire votre lettre, comme il vous a fait lire la
J’ai Ă©crit Ă  tous mes amis de ne pas venir avant quatre heures, parce que je travaille la nuit, je me lĂšve tard et je n’aime pas trop Ă  ĂȘtre entourĂ©e de monde quand je passe ma chemise », prĂ©vient George Sand Correspondance, 1837. À Nohant, elle avait Ă  une Ă©poque pris l’habitude de s’installer dans l’ancien boudoir de sa grand-mĂšre, au rez-de-chaussĂ©e parce qu’il n’y avait qu’une porte et que ce n’était un passage pour personne, sous aucun prĂ©texte que ce fut, justifie-t-elle dans Histoire de ma vie. Mes deux enfants Maurice, 1823-1860 et Solange, 1828-1899, NDLR occupaient la grande chambre attenante. Je les entendais respirer et je pouvais veiller sans troubler leur sommeil [
] Je faisais mon bureau d’une armoire qui s’ouvrait en maniĂšre de secrĂ©taire. » L’endroit Ă©tait petit, exigu, mais elle pouvait y noircir le papier Ă  son aise. J’ai Ă©crit Ă  tous mes amis de ne pas venir avant quatre heures, parce que je travaille la nuit, je me lĂšve tard et je n’aime pas trop Ă  ĂȘtre entourĂ©e de monde quand je passe ma chemise » George Sand En dĂ©pit – ou Ă  cause – de ses habitudes de travail nocturne, George Sand Ă©tait une hĂŽtesse accomodante, aimant Ă  recevoir dans cette maison hĂ©ritĂ© de sa grand-mĂšre et dont son divorce, en 1836, lui a enfin laissĂ© la pleine propriĂ©tĂ©. Pourtant, le Berry semble bien loin, vu de Paris. Voyons, un peu de courage, Ă©crit-elle Ă  son ami Gustave Flaubert Correspondance, 1867. On part de Paris Ă  9 heures et quart du matin, on arrive Ă  4 Ă  ChĂąteauroux, on trouve ma voiture et on est ici Ă  6 pour dĂźner. Ce n’est pas le diable, on vit entre soi comme de bons ours?; on ne s’habille pas, on ne se gĂȘne pas et on s’aime bien. Dis oui. » Comme lui, de nombreux artistes seront reçus Ă  Nohant au fil des annĂ©es, d’EugĂšne Delacroix Ă  HonorĂ© de Balzac, de ThĂ©ophile Gauthier Ă  Ivan Tourgueniev, en passant par Franz Liszt et Marie d’Agoult, qui prĂ©senteront FrĂ©dĂ©ric Chopin Ă  George Sand. Les journĂ©es s’organisent simplement. Le matin, pendant que la maĂźtresse de maison dort, chacun vaque Ă  ses occupations. On se retrouve en fin de journĂ©e pour le dĂźner et les divertissements. Recevez par mail notre newsletter loisirs et retrouvez les idĂ©es de sorties et d'activitĂ©s dans votre rĂ©gion. Auguste Charpentier a sĂ©journĂ© Ă  Nohant en 1838 et y a rĂ©alisĂ© ce portrait de George Sand, dont l'original se trouve Ă  Paris. On mĂšne ici l’existence la plus heureuse et la plus libre possible », commente en 1838 le jeune peintre Auguste Charpentier. Lors de ce sĂ©jour Ă  Nohant, il rĂ©alise le trĂšs beau portrait dont une copie trĂŽne aujourd’hui dans le salon de la maison. De George Sand, il Ă©crit Ă  sa tante, avec enthousiasme, que c’est la plus admirable tĂȘte que l’on puisse voir, et je ne suis pas encore revenu de ma premiĂšre impression. Je commence son portrait demain seulement, j’ai voulu avant passer une journĂ©e pour Ă©tudier son admirable personne. » L’original du tableau se trouve au musĂ©e de la Vie Romantique, Ă  Paris. La maison Pleyel envoyait un piano chaque Ă©tĂ© pour Chopin Venu en 1842 se reposer Ă  Nohant, le peintre EugĂšne Delacroix 1798-1863, lui, est saisi par l’inspiration lors d’une promenade, en voyant une vieille fermiĂšre et sa petite-fille. J’ai pu les regarder tout Ă  mon aise derriĂšre un buisson oĂč elles ne me voyaient pas, raconte-t-il. La vieille avait une main posĂ©e sur l’épaule de l’enfant, qui prenait attentivement une leçon de lecture. » Il offre le tableau, intitulĂ© L’Éducation de la Vierge, Ă  George Sand. On peut aujourd’hui le voir au musĂ©e EugĂšne-Delacroix, Ă  Paris. Une copie, rĂ©alisĂ©e par Maurice Sand, fut accrochĂ©e dans l’église Sainte-Anne de Nohant. L'Education de la Vierge, d'EugĂšne Delacroix. C’est aussi Ă  EugĂšne Delacroix que l’on doit le double portrait de Sand Ă©coutant Chopin au piano, rĂ©alisĂ© au dĂ©but de leur liaison, en 1838. Entre 1839 et 1846, le compositeur passera sept Ă©tĂ©s Ă  Nohant. À chacun de ses sĂ©jours, la maison Pleyel fait livrer un piano, et le rĂ©cupĂšre la saison finie. C’est lĂ , derriĂšre les portes capitonnĂ©es de sa grande chambre, Ă  l’étage, que vont naĂźtre de nombreuse Ɠuvres et chefs-d’Ɠuvre. Tous les ans, aux mois de juin et juillet, le Nohant festival Chopin rappelle le souvenir de ces Ă©tĂ©s dĂ©diĂ©s Ă  la musique, en donnant Ă  entendre des pianistes connus et de jeunes talents. Venu au dĂ©part pour rĂ©aliser les bustes de George Sand et de sa fille, en 1847, le sculpteur Auguste ClĂ©singer tombe amoureux de Solange et l’épouse, au grand dam de sa mĂšre. Lorsqu’une grosse dispute Ă©clate entre le couple et sa compagne, quelques mois plus tard, FrĂ©dĂ©ric Chopin prend le parti de Solange. AprĂšs avoir coupĂ© les ponts avec sa fille, George Sand rompt avec lui. Elle retrouve l’amour fin 1849, lorsque son fils, Maurice, lui prĂ©sente un ami graveur et auteur dramatique, Alexandre Manceau. Il a trente-deux ans, elle, quarante-cinq. Il sera son dernier amour et ils resteront ensemble jusqu’à la mort de Manceau, en 1865. Quelque temps avant leur rencontre, on avait commencĂ© Ă  faire du théùtre dans le salon de Nohant. Rapidement, ce loisir a pris de la place et George Sand a voulu le doter d’un lieu adaptĂ©. Restauration du théùtre du domaine de George Sand, maison de George Sand Ă  Nohant-Vic dans l'Indre, dĂ©cors de serre, patrimoine, le 04-02-22 Ă  Nohant Vic, photos Pierrick Delobelle Un vrai théùtre au rez-de-chaussĂ©e de la maison C’est ainsi qu’est nĂ© le théùtre amĂ©nagĂ© au rez-de-chaussĂ©e de la maison. Comme Maurice, Auguste Manceau s’est beaucoup investi dans cette activitĂ©, montant sur scĂšne, aidant Ă  la confection des dĂ©cors
 Entre 1846 et 1861, 150 piĂšces ont Ă©tĂ© jouĂ©es dans le théùtre, qui pouvait accueillir une soixantaine de spectateurs. Il vient d’ĂȘtre restaurĂ© et habillĂ© d’un dĂ©cor de serre, celui-lĂ  mĂȘme utilisĂ© lors de la derniĂšre reprĂ©sentation théùtrale donnĂ©e Ă  Nohant, en 1863 Datura Fabiosa, une piĂšce inspirĂ©e Ă  George Sand par un conte d’Hoffmann. Pratique. La domaine de George Sand est ouvert tous les jours de 9h30 Ă  13 heures et de 14 heures Ă  18h30. Parcours littĂ©raire Ă  la dĂ©couverte du jardin au travers de textes de George Sand sur le thĂšme des arbres. À partir de ces textes, tous les mercredis, jeu de piste en famille livret Ă  demander Ă  la boutique. Visite commentĂ©e uniquement de la maison Ă  10h15, 11h15, 14h30, 15h30, 16h30, 17h30. Tarif 8 euros; gratuit pour les moins de 18 ans. Renseignements au ; Quelques repĂšres historiques Biographie Famille. Elle est nĂ©e Amantine Aurore Lucile Dupin de Francueil, le 1er juillet 1804, Ă  Paris, de Maurice Dupin de Francueil et de Sophie-Victoire Delaborde. AprĂšs la mort de son pĂšre, le 18 septembre 1808, elle passe son enfance Ă  Nohant auprĂšs de sa grand-mĂšre, Marie-Aurore Dupin de Francueil, petite-fille du marĂ©chal de Saxe, dĂ©cĂ©dĂ©e le 26 dĂ©cembre 1821. ESTIVITES le Cher littĂ©raire, reportage Ă  la maison de George Sand Ă  Nohant-Vic, Ă©crivaine, romanciĂšre, dramaturge, Aurore Dupin, famille Sand, le 08-07-19 au chĂąteau de Nohant, photos Pierrick Delobelle Elle conservera toute sa vie un fort attachement Ă  la demeure familiale, Ă  la nature, au Berry, cadre de plusieurs de ses romans, et Ă  ses habitants. Mariage. Elle Ă©pouse François Casimir Dudevant, avocat Ă  la cour royale, Ă  Paris, le 17 septembre 1822. Ce mariage la libĂšre de la tutelle de sa mĂšre, mais n’ouvre pas pour autant les portes de la libertĂ© Ă  la nouvelle baronne Dudevant. TrĂšs vite, les Ă©poux se dĂ©chirent. Le 16 fĂ©vrier 1836, aprĂšs une longue procĂ©dure menĂ©e par l’avocat Michel de Bourges pseudonyme de Louis Michel, leur sĂ©paration est prononcĂ©e en sa faveur par le tribunal de La ChĂątre. Pour ma part, j’aimerais mieux passer le reste de ma vie dans un cachot que de me remarier Enfants et petits-enfants. Aurore et Casimir auront deux enfants Maurice, nĂ© le 30 juin 1823 Ă  Paris, mort le 4 septembre 1889 Ă  Nohant-Vic, et Solange, nĂ©e le 13 septembre 1828 Ă  Nohant-Vic, morte le 17 mars 1899 Ă  Paris. Le 17 mai 1862, Ă  Nohant-Vic, Maurice Ă©pouse Marceline Claudine Augustine, dite Lina » 1842-1901. Le couple aura trois enfants Marc-Antoine 1863-1864, Aurore 1866-1961 et Gabrielle 1868-1909. Les deux sƓurs n’ont pas d’enfants, mais Aurore adopte en 1958 son filleul, l’architecte Georges-AndrĂ© Smeets 1911-1970, mariĂ© Ă  Christiane Étave dite Christiane Sand 1927-2018. Deux filles naĂźtront de l’union de Solange avec le sculpteur Auguste ClĂ©singer 1814-1883, cĂ©lĂ©brĂ©e le 19 mai 1847 Ă  Nohant-Vic. La premiĂšre ne survit que quelques semaines?; la deuxiĂšme, surnommĂ©e Nini », nĂ©e le 10 mai 1849, dĂ©cĂšde le 14 janvier 1855. D’Aurore Ă  George Pseudonyme. En 1831, Aurore coĂ©crit Rose et Blanche avec Jules Sandeau. Le roman est signĂ© Jules Sand. L’annĂ©e suivante, lorsqu’elle rĂ©dige, seule, Indiana, son Ă©diteur l’incite Ă  conserver le nom de Sand. Le nom est tout pour la vente », commente-t-elle. Il lui faut un autre prĂ©nom, rien qu’à elle Je pris vite et sans chercher celui de George qui me paraissait synonyme de Berrichon ». Un prĂ©nom qu’elle va adopter dans la vie courante. Appelez-moi George au masculin - c’est une maladie que j’ai de ne pouvoir entendre, ni lire, l’ancien nom. Costume d’homme. C’est Ă  Paris qu’Aurore prend l’habitude de s’habiller en homme, par mesure d’économie, sur les conseils de sa mĂšre. Ayant Ă©tĂ© habillĂ©e en garçon durant toute mon enfance, ayant ensuite chassĂ© en blouse et en guĂȘtres, je ne me retrouvai pas Ă©tonnĂ©e du tout de reprendre ce costume, Ă©crit-elle dans Histoire de ma vie. [
] Je me fis donc faire une redingote-guĂ©rite en gros drap gris, pantalon et gilet pareils. Avec un chapeau gris et une grosse cravate de laine, j’étais absolument un petit Ă©tudiant de premiĂšre annĂ©e. Je ne peux pas dire quel plaisir me firent mes bottes j’aurais volontiers dormi avec [
] Je voltigeais d’un bout de Paris Ă  l’autre [
] mes vĂȘtements ne craignaient rien. Je courais par tous les temps, je revenais Ă  toutes les heures, j’allais au parterre de tous les théùtres. » L’Ɠuvre littĂ©raire. Au cours de sa vie, George Sand a Ă©crit quatre-vingts romans et nouvelles, sans compter des piĂšces de théùtre, des contes, des articles de journaux
 Sa correspondance, Ă©ditĂ©e en vingt-cinq volumes, est riche de vingt mille lettres, d’une vingtaine de pages chacune. Ses Ă©crits autobiographiques ont Ă©tĂ© Ă©ditĂ©s par la PlĂ©iade en 1970-1971, mais il a fallu attendre 2019 pour que quinze de ses romans, parmi lesquels la Mare au diable, Indiana, La petite Fadette, François le Champi
 entrent au catalogue. Martine Pesez
MauriceSand. (1823-1889) fils de George Sand. Il Ă©tait le premier enfant de George Sand et celui qui lui fut le plus attachĂ©. Il vĂ©cut toujours auprĂšs d'elle. La nature l'avait dotĂ© de plusieurs talents, pour le dessin et la peinture (il fut Ă©lĂšve de Delacroix), pour la littĂ©rature mais aussi pour la science (gĂ©ologie et biologie). Lettre vagabonde – 28 juillet 2019 De tous les temps, les femmes ont eu quelque chose Ă  dire. Leurs voix furent souvent recouvertes d’indiffĂ©rence et Ă©crasĂ©es sous le mĂ©pris. George Sand semble faire exception. Elle vĂ©cut une vie trĂ©pidante et dĂ©vouĂ©e Ă  toutes les causes. Elle a fait couler beaucoup d’encre en affichant une libertĂ© farouche et hors norme pour son Ă©poque. La formidable biographie de Michelle Perrot, publiĂ©e en 2018, apporte un Ă©clairage indispensable sur une figure de proue de son temps. Michelle Perrot nous entraĂźne dans les activitĂ©s palpitantes de Nohant jusqu’à la mort, en 1876, de l’ñme qui en dĂ©tenait le sĂ©same ouvre-toi. George Sand Ă  Nohant Une maison d’artiste, » nous fait apprĂ©cier et admirer un grand esprit du XIXe siĂšcle. La biographe a entrepris des recherches poussĂ©es Ă  commencer par la lecture de la volumineuse correspondance de ce monument Ă©pistolaire. » Ses lettres furent publiĂ©es en vingt-six tomes sous la direction de Georges Lubin. En tout cinquante mille lettres envoyĂ©es Ă  vingt mille correspondants. Active, talentueuse, littĂ©raire et scientifique, George Sand contribuera Ă  rendre meilleure la vie des gens. Elle professait ses idĂ©es libĂ©rales accordant plus de libertĂ© au peuple français, aux gens de la campagne. Elle dĂ©plorait la condition des femmes sous le joug d’une autoritĂ© masculine. Auteure de cent romans dont La petite Fadette, Consuelo et La mare au diable, on la retrouve passionnĂ©e pour la musique, le théùtre, la peinture. Cette femme s’investit Ă©galement dans l’éducation, la politique, l’agriculture, la botanique, l’entomologie et la minĂ©ralogie. Des activitĂ©s dans tous ces domaines se dĂ©roulent Ă  Nohant. GrĂące Ă  son Ă©criture, elle supportera financiĂšrement les artistes et scientifiques se rassemblant sous son toit. Heureusement, elle avait la plume facile. Je reconnus que j’écrivais vite, facilement, longtemps, sans fatigue. » clamait l’écrivaine en ajoutant, J’ai beaucoup de plaisir et d’amusement Ă  Ă©crire. » GrĂące Ă  ses voyages et Ă  son intarissable curiositĂ©, George Sand se maintenait Ă  la fine pointe des courants majeurs qui secouaient son pays. Elle dĂ©fendit la cause des paysans et fit la promotion de clubs privĂ©s afin d’instruire et former la population en politique. Se soulevant contre la condition infĂ©rieure subie par les femmes, elle qualifiait les mariages arrangĂ©s d’une forme de prostitution et de viol. Si elle consacrait son temps Ă  l’instruction de ses enfants, Solange et Maurice, elle veillait aussi Ă  instruire les domestiques et femmes de chambre. Elle leur apprenait Ă  lire. Nohant s’avĂšre un lieu accueillant et ouvert Ă  toute forme de savoir. Elle rĂȘvait grand pour Nohant et la maison fut transformĂ©e Ă  la dimension de ses projets. Les dĂźners de quinze convives Ă©taient monnaie courante. Les curieux et les amis Ă©taient rentrĂ©s dans l’orbite de Sand, de cette communautĂ© des goĂ»ts, des intelligences et des cƓurs qu’elle rĂȘvait de constituer. » Pour Sand, l’art se perdrait certainement s’il ne crĂ©ait pas de sanctuaires pour se retremper. » Auquel ajoute Michelle Perrot, Une oasis, un sanctuaire la vocation idĂ©ale de Nohant. » George Sand dĂ©ploie un dĂ©vouement inconditionnel aux artistes. Une chambre Ă  la porte capitonnĂ©e offrit Ă  FrĂ©dĂ©ric Chopin un lieu privilĂ©giĂ© oĂč il composa la majeure partie de ses Ɠuvres. Des carriĂšres de chanteuses, de musiciens prirent leur essor en ces lieux. Les peintres ne furent pas en reste. Se succĂ©dĂšrent Ă  Nohant EugĂšne Delacroix, ThĂ©odore Rousseau et bien d’autres. Ils furent dotĂ©s d’un vaste atelier. Maurice, le fils, eut aussi droit Ă  son atelier oĂč il s’adonna aux dessins et Ă  l’aquarelle. Parmi les Ă©crivains, citons HonorĂ© de Balzac, Gustave Flaubert, Tourgueniev, ThĂ©ophile Gauthier. Alexandre Dumas y sĂ©journa plus d’un mois et demi. Comme George Sand admirait toute forme d’art, elle amĂ©nagea une loge, une scĂšne et une salle ouverte au public du Berry. De grands comĂ©diens y jouĂšrent dont Arnaud Passy et Pierre Bocage. Avec Maurice Sand, le théùtre de marionnettes fut reconnu et perfectionnĂ©. La mĂšre confectionnait les costumes des personnages confectionnĂ©s par le fils. Savants et politiciens, sous la RĂ©publique s’arrogent les faveurs et l’appui de la dame de Nohant. Elle accueille les opposants au dogmatisme clĂ©rical et Ă  l’aristocratie rĂ©trograde. Elle-mĂȘme adhĂšre Ă  la rĂ©publique dĂ©mocratique et sociale. Il existe bien des façons de s’instruire et George Sand les emprunte toutes. On retrouve des volumes dans bon nombre de domaines scientifiques et artistiques. Pour chacun de ces domaines, elle a invitĂ© Ă  Nohant d’éminents spĂ©cialistes et entreprit des voyages d’exploration. Elle aura Ă©tudiĂ© dans toutes ces branches de savoir. Ses jardins bien amĂ©nagĂ©s sont la preuve de ses connaissances en botanique. La protection de la nature fut son champ de bataille. Pour accommoder tous les gens qui sĂ©journent chez elle, Sand aura créé deux ateliers de peinture, un atelier de gravure, une bibliothĂšque de huit mille volumes, un petit théùtre et un magasin de dĂ©cor. Toutes les piĂšces sont remplies. MalgrĂ© son peu de fortune, la dame de Nohant aura contribuĂ© Ă  l’avancement des arts, de la littĂ©rature et des sciences, et ce mĂȘme Ă  l’extĂ©rieur de la France. En Californie, elle a financĂ© une communautĂ© du nom de Commune libre de Mokelumne Hill oĂč se rassemblait l’immigration française. On se demande oĂč l’écrivaine trouvait le temps d’écrire. L’horaire de George Sand travailler, dormir, manger. » Son lieu d’écriture, une chambre si exiguĂ« qu’elle installe un hamac au lieu d’un lit et un bureau au lieu d’une table d’écriture. Ses agendas indiquent un respect scrupuleux de son emploi du temps. Elle Ă©crivait d’une heure du matin jusqu’en dĂ©but de matinĂ©e, dormait quatre Ă  cinq heures, dĂ©jeunait, faisait sa correspondance, travaillait Ă  l’extĂ©rieur, lisait avant de dĂźner avec les nombreux invitĂ©s et pensionnaires des lieux. Les soirĂ©es Ă©taient consacrĂ©es Ă  la musique et au théùtre. L’horaire de Churchill paraĂźt faible et terne Ă  cĂŽtĂ© de celui de Sand. Michelle Perrot nous invite Ă  Nohant oĂč George Sand nous accueille chaleureusement dans sa maison d’artiste. On partage les goĂ»ts, les rĂȘves et les connaissances de la maĂźtresse des lieux. La biographie nous livre le quotidien d’une femme exceptionnelle, douĂ©e et gĂ©nĂ©reuse ainsi que le portrait d’une Ă©poque. L’écriture est souple et entraĂźnante comme un bon roman. Une lecture motivante qui rejoint sĂ»rement les aspirations de nombreux lecteurs et lectrices. Pour voir des photos de la maison de George Sand, cliquez sur le lien ci-dessous. Maison de George Sand

Nosbureaux de représentation Lyon Bruxelles Aix en Provence Vente de catalogues Rejoindre nos équipes Restitutions Ordres d'achats . SAND George (1804-1876) Résultat; SAND George (1804-1876) Lot n° 692 ; Lot n° 692. Aller au lot

Le 2 mai 1832, la critique littĂ©raire salue la sortie Ă  Paris d'un roman intitulĂ© Indiana. TirĂ© Ă  750 exemplaires, il dresse la critique de la vie bourgeoise sous le rĂšgne de Louis-Philippe 1er. Son auteur est un inconnu du nom de George Sand. DerriĂšre ce pseudonyme se cache une jeune femme de 28 ans au parcours dĂ©jĂ  rocambolesque, nĂ©e le 1er juillet 1804 Ă  Paris sous le nom d'Amantine Aurore Lucile Dupin. Ses parents sont un officier et la fille d'un pauvre cabaretier. Elle Ă©pouse Ă  18 ans le baron Dudevant dont elle se sĂ©parera en 1836 aprĂšs une relation orageuse et de multiples liaisons. Un an aprĂšs le mariage, en 1823, naĂźt un garçon, Maurice. Cinq ans plus tard naĂźt une fille, Solange. Le pseudonyme George Sand sous lequel Aurore accĂšde Ă  la cĂ©lĂ©britĂ© littĂ©raire rappelle par ailleurs Jules Sandeau, l'amant avec lequel elle a commencĂ© Ă  Ă©crire. PassionnĂ©e et volontiers exubĂ©rante, rĂ©volutionnaire et rĂ©publicaine dans l'Ăąme, elle mĂšne en marge de ses travaux d'Ă©criture maints combats politiques et des engagements fĂ©ministes avant l'heure. Elle ne craint pas non plus de scandaliser les bonnes Ăąmes en s'affichant en tenue d'homme ou avec un cigare. Retour Ă  la terre La maturitĂ© venue, la romanciĂšre prend ses distances avec la bourgeoisie louis-philipparde et dĂ©couvre comme bien d'autres le monde du travail. Elle devient ainsi l'amie du peintre Jean-François Millet, l'auteur de L'AngĂ©lus. AprĂšs les journĂ©es rĂ©volutionnaires de 1848, elle se retire dans son chĂąteau de Nohant, au coeur de cette campagne berrichonne qui lui fournit la matiĂšre de ses meilleurs romans La Mare au diable 1846, François le Champi 1847 ou encore La petite Fadette 1849. Elle Ă©crit vite. Quatre jours lui suffisent par exemple pour Ă©crire La Mare au diable, l'un de ses plus cĂ©lĂšbres ouvrages. Mais elle prend ensuite son temps pour relire et corriger son texte. AprĂšs le coup d'État de Louis-NapolĂ©on Bonaparte et la fondation du Second Empire, en 1852, elle se tient Ă  l'Ă©cart du pouvoir mais conserve l'estime de l'empereur, lui-mĂȘme connu pour sa fibre sociale. La dame de Nohant » meurt dans la sĂ©rĂ©nitĂ© le 8 juin 1876. PassionnĂ©e, provocatrice, elle a créé un personnage inĂ©dit la femme libĂ©rĂ©e. PubliĂ© ou mis Ă  jour le 2020-04-29 124126
SAND George (1804-1876). Lettre autographe adressée à son fils Maurice. S.l.n.d. [La Chùtre: 17 mai 1836] 4 pp. grand in-4 (257 x 205 mm). (Partiellement déchirée au niveau de la pliure avec manque de 2 mots). BELLE LETTRE DE MISE EN GARDE DE GEORGE SAND à SON FILS MAURICE, CURIEUSEMENT EN CONTRADICTION AVEC LES AVENTURES ROMANTIQUES ET

Quarante annĂ©es consacrĂ©es Ă  l’écriture, prĂšs de quatre-vingt-romans, une trentaine de piĂšces de théùtre, des articles, des contes, des nouvelles, une correspondance colossale, des amitiĂ©s et amours nombreuses. George Sand Ă©tait, Ă  n’en pas douter, une femme gĂ©nĂ©reuse, et sa maison de Nohant en tĂ©moigne. Visiter Nohant-Vic, dans le Berry, c’est dĂ©couvrir une George Sand intime, accueillante, extrĂȘmement soucieuse de ses invitĂ©s, du bien-ĂȘtre de ses domestiques et celui de ses petites-filles, amoureuse de la nature et en avance sur son temps. Suivez le guide pour un aperçu de ce lieu chargĂ© en Ă©motions, de ses principales piĂšces, de son histoire et de celle de la famille Dupin. Une maison familiale Si Nohant est un lieu aussi Ă©mouvant, aussi chargĂ© d’histoires, c’est peut-ĂȘtre car il s’agit d’une maison familiale, transmise de gĂ©nĂ©rations en gĂ©nĂ©rations, et qui ne fut jamais laissĂ©e Ă  l’abandon. Visiter Nohant, c’est dĂ©couvrir une maison, mais aussi un jardin, son ancien poulailler, un cimetiĂšre dans lequel sont enterrĂ©s les membres de la famille Dupin, ainsi qu’une exposition dĂ©diĂ©es aux marionnettes de Maurice Sand, le talentueux et polyvalent fils de George. La dĂ©coration de la maison est soignĂ©e sans ĂȘtre chargĂ©e, la visite est bien pensĂ©e et Ă©quilibrĂ©e, les piĂšces principales donnent sur une nature que l’on devine essentielle. On y imagine aisĂ©ment la vie de celles et ceux qui y vĂ©curent. Une vie entiĂšre, ou presque, Ă  Nohant Aurore Dupin, future George Sand, naĂźt en 1804 et elle vient pour la premiĂšre fois Ă  Nohant Ă  l’ñge de quatre ans, en 1808. La propriĂ©tĂ© appartient Ă  sa grand-mĂšre paternelle, Marie-Aurore de Saxe. Aurore Dupin est la fille de Maurice Dupin, militaire, colonel des armĂ©es napolĂ©oniennes, et de Sophie Victoire Delaborde, cantiniĂšre que Maurice Dupin avait rencontrĂ©e en service. La mĂšre de Maurice s’est opposĂ©e en vain Ă  cette mĂ©salliance, et la petite Aurore est le fruit de deux milieux, deux histoires, deux hĂ©ritages. Lors de ce premier sĂ©jour Ă  Nohant, Maurice a un accident de cheval. Il meurt sur le coup, Ă  l’ñge de trente ans. La grand-mĂšre paternelle, dĂ©jĂ  veuve, dont le fils unique vient de dĂ©cĂ©der, propose prend en charge l’éducation d’Aurore. Aurore restera donc Ă  Nohant, mais ne cessera jamais d’entretenir un lien avec sa mĂšre, demeurĂ©e Ă  Paris. Aurore commence par passer ses Ă©tĂ©s Ă  Nohant et ses hivers Ă  Paris, avant de s’établir toute l’annĂ©e Ă  Nohant. Lorsque sa grand-mĂšre dĂ©cĂšde, George Sand a dix-sept ans. Elle hĂ©rite de la maison, s’empresse de se marier afin de pouvoir y rester en paix et d’avoir la respectabilitĂ© pour l’administrer. De ses quatre ans jusqu’à a mort, George Sand passera plusieurs mois par an Ă  Nohant et elle mourra dans sa chambre, en 1876. Ses deux enfants, Maurice et Solange y grandiront, Maurice y vivra avec sa femme et ses filles. AprĂšs son divorce, George Sand devient l’unique gestionnaire et propriĂ©taire du domaine. Les deux-petits filles de George Sand, Aurore et Gabrielle, les filles de Maurice, habiteront la maison, l’investiront elles aussi aprĂšs la mort de leur grand-mĂšre. Nohant se transmettra de gĂ©nĂ©rations en gĂ©nĂ©rations. Gabrielle meurt Ă  l’ñge de quarante ans, en 1909. Aurore, derniĂšre descendante de la famille, lĂšguera de son vivant la maison Ă  l’État. La salle Ă  manger La salle Ă  manger de la maison tĂ©moigne de la vocation de cette maison, celle d’ĂȘtre un lieu d’accueil et de convivialitĂ©. La table dressĂ©e pour dix invitĂ©s, jamais plus, Ă©voque plutĂŽt la fin de vie de George Sand, mais les invitĂ©s mentionnĂ©s ne s’y retrouvĂšrent jamais en mĂȘme temps. Sont ici reprĂ©sentĂ©s, parcourant dix ans de la vie de George Sand, Ivan Tourgueniev, qui ne fit qu’un seul sĂ©jour Ă  Nohant, Gustave Flaubert qui y sĂ©journa trĂšs souvent, Dumas fils qui vint Ă  cinq reprises, la cantatrice Pauline Viardot qui vint tous les Ă©tĂ©s pendant vingt-cinq ans. Chaque dĂ©cennie eut son hĂŽte de marque. Les verres en cristal seraient un cadeau de Chopin, le lustre en verre vient de Murano et fut achetĂ© Ă  Paris par George Sand, Ă  l’occasion d’une exposition universelle. Le motif de fraisier sur la vaisselle fut dessinĂ© par George Sand elle-mĂȘme. En 1850, George Sand entreprit de gros travaux et fit installer un chauffage central dans la salle Ă  manger. L’hiver, le dĂźner Ă©tait servi Ă  17h. AprĂšs le dĂźner, on quittait la salle Ă  manger pour le salon. Le salon Le salon Ă©tait le lieu de la veillĂ©e, qui pouvait durer jusqu’à minuit. Autour de la table du salon on discute, on lit Ă  voix haute, on manipule des marionnettes, on dessine, on fait des herbiers. Comme elle a de multiples talents, George Sand joue de la harpe, du piano, excelle dans les travaux d’aiguille. La chambre rose Cette chambre, en encore marquĂ©e de l’empreinte du XVIIIe siĂšcle, trahit les origines aristocratique de la grand-mĂšre de George Sand qui faisait salon dans sa chambre. La chambre devint celle de Solange et Maurice, les enfants de George Sand, et George Sand investit le couloir afin d’ĂȘtre Ă  proximitĂ© de ses enfants et de pouvoir Ă©crire, la nuit, ses journĂ©es Ă©tant extrĂȘmement peut y voir le placard transformĂ© en bureau qui sera la premiĂšre rĂ©elle table de travail de George Sand en tant que femme de lettres. La cuisine George Sand avait une dizaine de domestiques Ă  son service, pour l’aider Ă  s’occuper de la propriĂ©tĂ©, mais aussi choyer ses invitĂ©s illustres tels que Franz Liszt ou Prosper MĂ©rimĂ©e. En 1850, en mĂȘme temps que l’installation du chauffage, George Sand dote sa grande cuisine de divers Ă©lĂ©ments et d’un four particuliĂšrement sophistiquĂ©. Ce four, moderne, dĂ©contenance les cuisiniĂšres berrichonnes qui sont Ă  son service – on cuisine sans voir les flammes, on a quatre fours, c’est Ă  l’époque du jamais vu – mais les robinets permettent de disposer de quarante litres d’eau chaude. Il s’agit d’un confort exceptionnel pour l’époque, confort renforcĂ© par la grande table en orme massif que George Sand commande Ă  un menuisier local, afin que tous les domestiques puissent manger ensemble, et se rassembler. Un passe-plat, dans le couloir attenant Ă  la cuisine, dessert la salle Ă  manger. George Sand, elle, investira la cuisine pour faire des confitures. FrĂ©dĂ©ric Chopin Ă  Nohant La relation amoureuse avec FrĂ©dĂ©ric Chopin durera neuf ans et le musicien sĂ©journera sept Ă©tĂ©s durant dans cette maison, du printemps Ă  l’automne, de 1840 Ă  1847. George Sand lui donne Ă  chaque fois la plus belle chambre, loue pour l’occasion un piano Pleyel qui arrive de Paris. Cette maison connaĂźtra sept pianos diffĂ©rents chaque Ă©tĂ©, et Chopin composera les deux-tiers de son Ɠuvre dans cette maison. Les annĂ©es avec Chopin, entre 1840 et 1847, constituĂšrent l’ñge d’or de Nohant. George Sand Ă©crivait, FrĂ©dĂ©ric Chopin composait, EugĂšne Delacroix peignait. Trois monstres sacrĂ©s se retrouvĂšrent en mĂȘme temps dans cette maison. La chambre bleue Le bleu Ă©tait la couleur prĂ©fĂ©rĂ©e de George Sand, et la chambre bleue Ă©tait celle de la maĂźtresse de maison, du moins sa derniĂšre chambre pendant une dizaine d’annĂ©es. C’est dans cette chambre, qui donnait sur le jardin, qu’elle s’éteignit Ă  l’ñge de 72 ans. Juste Ă  cĂŽtĂ© se trouvent un cabinet de travail, dans lequel elle travaillait, ainsi qu’une bibliothĂšque ou salle d’études, Ă  laquelle tout le monde avait accĂšs, et qui renfermait toute la documentation, classĂ©e, de la maison. Le 17 janvier 1869, George Sand Ă©crivait Ă  son grand ami Gustave Flaubert combien elle Ă©tait en paix Ă  Nohant L’individu nommĂ© G. Sand se porte bien, savoure le merveilleux hiver qui rĂšgne en Berry, cueille des fleurs, signale des anomalies botaniques intĂ©ressantes, coud des robes et des manteaux pour sa belle-fille, des costumes de marionnettes, dĂ©coupe des dĂ©cors, habille des poupĂ©es, lit de la musique mais surtout passe des heures avec la petite Aurore qui est une fillette Ă©tonnante. Il n’y a pas d’ĂȘtre plus calme et plus heureux dans son intĂ©rieur que ce vieux troubadour retirĂ© des affaires, qui chante de temps en temps sa petite romance Ă  la lune, sans grand souci de bien ou mal chanter pourvu qu’il dise le motif qui lui trotte par la tĂȘte, et qui, le reste du temps, flĂąne dĂ©licieusement. Ça n’a pas Ă©tĂ© toujours si bien que ça. »[1] Vous souhaitez en savoir plus et relire des textes de George Sand ? DĂ©couvrez notre autre article consacrĂ© la femme de lettres, mais aussi notre anthologie Un texte Une femme, La littĂ©rature au fĂ©minin en 365 jours, sur laquelle retrouver dix-neuf textes de George Sand. Sarah Sauquet [1] Lettre de George Sand Ă  Gustave Flaubert, Nohant, 17 janvier 1869

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